14 mai 1914
Avec ses arcades Belle-époque, la Société Générale semble une banque sérieuse. Et pourtant, ce 14 mai 1914, un vent de panique s’empare des clients. Une rumeur se répand dans la ville selon laquelle la banque aurait suspendu ses paiements. Chacun se précipite au guichet pour récupérer ses avoirs. A la fin de la journée, tous les clients sont remboursés mais la confiance est rompue et, pour le personnel de la banque, l’incompréhension est totale. Face à l’agitation inhabituelle dans la rue Porte de Paris, le commissaire de police a jugé bon d’appeler la préfecture qui, elle-même, a contacté Paris. Le soir même, l’affaire est entendue. Que s’est-il passé ?
Au tournant du siècle, le marché financier français est marqué par la profusion de titres étrangers. turcs, égyptiens, russes ou encore sud-américains. Certains de ses titres s’avèrent parfois fantaisistes, voire frauduleux, et nombre de petites banques privées en font les frais. Parallèlement, la presse financière se laisse facilement acheter et les grandes banques n’hésitent pas à communiquer de fausses informations sur la concurrence.
C’est ainsi qu’au printemps 1914, les articles se succèdent dans plusieurs journaux, ébranlant la confiance des clients de la Société générale. Le 5 mai 1914, « L’Indépendant » titre « Un Titanic financier va sombrer ». Un autre journal s’alarme, écrivant en première page « la Société Générale à l’agonie ». Reprenant l’information, d’autres éditions comme « France-Univers » ou « Le cri d’alarme » largement diffusés en province annoncent la faillite de la banque parisienne. C’est notamment la chute des titres de la Brazil Railway, emis par la Société Générale, qui met le feu aux poudres. Société de construction et d'exploitation des chemins de fer et des ports sud-américains, la Brazil Railway s’avère particulièrement fragilisée.
La campagne de presse est si virulente qu'elle déclenche un mouvement de retraits des dépôts notamment à Rennes, Brest, Poitiers et Thouars.
Depuis son siège parisien, la Société Générale demande elle-même au ministre des Finances, René Renoult, qu’une enquête soit diligentée pour prouver sa bonne santé financière. On découvrira alors que la Deutche Bank avait fomenté cette rumeur pour fragiliser sa rivale française.
Trois mois avant le déclenchement de la Première guerre mondiale, la bataille avait déjà commencé dans le monde secret de la finance.
SHAAPT
BP 17
79100 thouars